Entre l’Ascension de Jésus et la Pentecôte

Bien-aimés du Seigneur nous sommes aujourd’hui au 7e Dimanche de Pâques. Encore une semaine, et c’est la Pentecôte. Entre l’Ascension de Jésus et la Pentecôte, ce dimanche nous invite à être comme les disciples, hommes et femmes, qui, « après avoir vu Jésus s’en aller dans le ciel », dit le livre des Actes des Apôtres, rentrèrent à Jérusalem, montèrent à l’étage de la maison pour « participer fidèlement à la prière ». C’est comme une retraite d’une dizaine de jours qui commence pour eux, avant que l’Esprit de Jésus ne vienne leur inspirer gestes et paroles pour la mission qu’il leur a confié.

Aujourd’hui, l’Eglise nous fait méditer une partie du long discours-testament que Jésus leur avait adressé après le dernier repas qu’il avait pris avec eux, quelques heures avant son arrestation. Jésus s’adresse directement à son Père en une fervente prière. Frères et soeurs, pourquoi ne fassions-nous pas sienne cette prière de Jésus tous les jours de notre vie comme les hommes et femmes réunis au cénacle, « dont Marie, mère de Jésus » ? Pour cela, je crois qu’il serait indispensable de se réapproprier quelques-unes de ces expressions pour qu’elles deviennent plus parlantes pour nous aujourd’hui. Ces expressions sont : « glorifier » (six fois dans le texte), « vie éternelle », de « connaître » et de « reconnaître ». Ceci pour ne pas leur attribuer des faux-sens, mais pour réaliser combien ils sont d’une importance vitale pour chacun de nous, disciples de Jésus.

La gloire : Ce mot, tous, nous le connaissons très bien. Aujourd’hui, « être glorifier, avoir la gloire » est devenu une chose après laquelle tout le monde court, d’une manière ou d’une autre. Un peu comme Monsieur Jourdain, le bourgeois gentilhomme de Molière qui rêvait d’être Mamamouchi. On rêve, pas nécessairement d’être célèbre ou comblé d’honneurs, mais tout simplement de jouir d’une certaine considération, d’être reconnu ; d’être « Vu »... Être la vedette ; être au centre de tout... Sans moi, c’est le chaos.

Et pourtant, innombrables sont celles et ceux qui courent après cette gloire, cette renommée. Saint Ignace, racontant toute son aventure spirituelle, nous dit que lui aussi, il a rêvé de gloire et d’honneurs jusqu’à ce que, blessé au siège de Pampelune, il en vienne à envisager à une autre forme de gloire, celle qui consiste à suivre Jésus dans son cheminement humain de service fraternel, « pour la plus grande gloire de Dieu » que j’ai tellement envie de vous demander que nous remplacions souvent dans nos vies le mot « gloire » par un mot plus actuel : la renommée. Aussi, pourquoi traduisons-nous pas encore dans nos vies, cette prière de Jésus par une prière pour que ses disciples – vous et moi – soyons capables de connaître, de reconnaître le seul Dieu et son Fils Jésus, et le faire connaître au monde entier, et ainsi assurer sa renommée, sa gloire ? C’est là leur / notre mission, celle qui leur/ nous sera confirmée au jour de Pentecôte : faire connaître Dieu « pour sa plus grande gloire » et par là même communiquer sa vie.

La vie éternelle : Il nous faut bien nous entendre sur la signification de cette expression si fréquente dans toute l’Écriture : la vie éternelle. Un faux sens, bien souvent reproduit, consiste à réduire la vie éternelle à la vie après la mort. Comme si Dieu attendait que l’on soit mort pour nous aimer. Un Dieu lointain, étranger à toute notre vie terrestre. En réalité la vie éternelle, pour chacun des chrétiens, est commencée au baptême ; nous en vivons aujourd’hui. C’est la vie même de Dieu. Un Dieu – mon Père – qui se fait connaître, non pas d’une connaissance intellectuelle, mais en se donnant sans cesse à moi dans des gestes d’amour concrets.

Connaître : « La vie éternelle, c’est de te connaître, toi, le seul Dieu, le vrai Dieu, et de connaître celui que tu as envoyé, Jésus Christ ». Il nous faut donc, pour terminer, bien préciser le sens du mot « connaître ». Deux significations distinctes, selon qu’il s’agit d’objets ou de personnes. La connaissance scientifique ou intellectuelle est une chose qui ne nécessite que l’usage de notre intellect. Par contre, dès qu’il s’agit de la connaissance de personnes, tous nos sens, ainsi que notre affect, interviennent. On ne cherche à connaître que lorsqu’on en vient à désirer, à nous intéresser, à aimer l’autre. Pour apprendre à connaître Dieu, il faut le fréquenter, s’en faire proche, créer avec lui une vraie relation. Une relation telle qu’on en vient, comme dans tout amour, à ne vouloir plus faire qu’un avec lui. Voilà ce que le Dieu de Jésus nous propose : un amour éternel. Une vie éternelle.