LA PUISSANCE DU PARDON

Seigneur, quand mon frère commettra des fautes contre moi, combien de fois dois-je lui pardonner ? Jusqu’à sept fois ? (Mt 18, 21-35)
La passion première qui anime tout homme face au mal qui lui est infligé est la vengeance. C’est dire, comme l’écrivait Jean Paul, II que « le pardon n’est pas pour l’homme quelque chose de spontané et de naturel. Pardonner d’un coeur sincère peut parfois se révéler héroïque ». C’est pourquoi, avec le réalisme qui le caractérise, Pierre demande à Jésus, à peu près ceci : « Jusqu’à quand dois-je patienter avant de réagir ? » Jusqu’à sept fois ? Sans revenir sur tout le symbolisme du chiffre Sept dans les Ecritures, remarquons tout simplement
que Jésus va aller au-delà des calculs de Pierre. Il l’appelle à pardonner
jusqu’à soixante-dix fois sept fois.
Autrement dit, pour le chrétien, il n’y a pas de limitation quand il s’agit
d’offrir et de recevoir le pardon. Pas plus qu’il n’y a de conditions préalables. En effet, pour le croyant, le pardon, est d’abord un acte de reconnaissance envers Dieu qui le premier lui pardonne. C’est le sens de la parabole du débiteur impitoyable. Par ailleurs pardonner c’est se libérer de la prison des rancoeurs et des ressentiments qui peuvent empoisonner notre vie spirituelle, psychique et somatique. Certes, le pardon peut relever parfois de l’héroïsme mais il demeure le seul moyen de guérir d’une blessure à nous infliger.
Pour le rendre possible, il convient de se rappeler que pardonner ce n’est pas oublier mais dépasser. C’est une volonté soutenue de faire une relecture, avec des sentiments nouveaux du tort et tirer de l’expérience subie des leçons pour des relations renouvelées. Enfin, loin d’être une caution à l’injustice, ou encore une négation de la justice, le pardon permet de ne pas réduire l’offenseur à l’offense et de lui redonner sa dignité.

Père Rodrigue ABOTSI